WHY DO WE FALL ?

Je récupérais mes papiers d’identité des mains de l’agent des douanes qui me le tendait un sourire entendu aux lèvres. Elle y avait à peine jeté un coup d’oeil, pour la forme, sans vraiment s’attarder sur mon cas. Il faut dire qu’elle n’était pas franchement en mesure d’improviser un interrogatoire à l’encontre du détenteur d’un passeport diplomatique qui comme son nom l’indique, appartient généralement à quelqu’un qu’on ne met pas en garde à vue surprise sauf si l’ont tiens à perdre un emploi précieux en temps de crise. En ce qui me concerne c’est mon temps qui est précieux et je rejoignais déjà la sortie de l’Aéroport pour retrouver la berline avec chauffeur qui me conduirait à ce qui serait mon domicile pour les mois à venir.

Cet appartement de Belgravia, mis a disposition par le MI6, n’avait pas du être occupé depuis des lustres à en juger par le lustre suspendu dans l’entrée d’ailleurs, poussiéreux à souhait et le mobilier d’un autre age épargné par les tentures toujours en place qui les recouvraient. S’il fallait avouer un certain cachet à l’ensemble, ne serais-ce que le prestige de l’adresse, on restait tout de même bien loin de ce qui se faisait d’ordinaire dans ma famille.

Je trouvais dans le frigidaire de quoi me sustenter de façon basique, et sur ce qui me servirait de bureau, un dossier secret défense sont je connaissais la majeure partie du contenu et qui me fournirait les détails concernant ma mission. D’un rapide coup d’oeil dans les pages intérieure j’apprenait que la jeune femme dont il était question vivait à deux pas, dans le quartier de westminster. Je découvrait aussi pour la première fois son visage sur une photographie d’elle prise à son insu alors qu’elle marchait dans la rue. Finalement rien que je n’aurait pu découvrir par moi-même en feuilletant les pages du bottin mondain auquel j’appartiens moi-même. Je n’aurait pas à faire preuve d’imagination pour justifier de ma présence au sein de la haute société anglaise et c’est la raison - l’unique raison - pour laquelle on m’avait confié la tâche qui était la mienne. L’aristocratie c’est comme le vélo: ça ne s’oublie pas. La façon de se tenir, la façon de s’exprimer, tout ses codes étaient encrés profondément dans un patrimoine génétique entretenu depuis 1141.

Pour l’heure, je mettrais à profit la proximité du Royal Albert Hall pour profiter de ma soirée tout en refaisant doucement surface dans un milieu qui savait parfaitement qui j’étais sans avoir souvent l’occasion de me croiser. La simple évocation de mon nom de famille suffirait à me garantir une des meilleures places, un de ces endroits privilégiés ou l’ont s’assoie pour voir mieux que tout le monde et être vu par tout le monde. A cette occasion, il me fallait une tenue décente à me mettre sur le dos et j’envisageait déjà d’envoyer une note de frais pharaonique au service de comptabilité du MI6 après un passage obligatoire chez le tailleur.

J’allais quitter l’appartement dans cette intention, mais je décidais de revenir rapidement sur mes pas. J’ouvrais le tiroir du bureau afin d’y déposer mon 9mm automatique et son chargeur que je venais de dissocier l’un de l’autre. Ma mission ne faisait que commencer, pour l’instant seul ma vigilance devrait garantir ma sécurité et j’espérais ne pas en arriver à de tels recours avant longtemps.

Dans cette rue peuplée d’héritiers et de milliardaires en tout genre, je fumais une cigarette alors que mon chauffeur patientait tranquillement le temps que je me décide à monter en voiture. Le goût de la nicotine n’étais pas aussi amère que la perspective de me replonger corps et âme dans ce milieu duquel je me tenais jusqu’à présent à l’écart. Seul la perspective d’y jouer un rôle plus excitant que celui qui avait été destiné pour moi à la naissance adoucissait mon avenir proche, car en raison d’un passé jusque là morose je savais qu’en dehors de cette mission à accomplir, il n’y avait rien ni personne pour moi ici.